L’électricité est au cœur de notre société. Elle est centrale pour le développement économique, fournissant l’énergie nécessaire pour alimenter les industries, les entreprises et les ménages. Cependant, les marchés actuels qui régissent la production et la consommation d’électricité présentent de nombreux défis. Dans un chapitre introductif de cette thèse, je décris en détail pourquoi nous avons besoin de suffisamment d’investissements. Je discute également des principales idées théoriques qui ont conduit à la libéralisation et à la mise en place des marchés de l’électricité. Je rappelle que si la théorie affirme que le niveau d’investissement peut être atteint grâce aux marchés, il existe un grand nombre de problèmes qui empêchent ces marchés d’être pleinement efficaces. C’est dans ce contexte que cette thèse s’intéresse à comprendre comment déterminer des architectures de marché permettant de donner des incitations vertueuses aux acteurs tant du côté de la production que de la consommation. La méthodologie employée repose sur une représentation théorique des comportements d’acteurs dans l’ensemble des marchés électriques et s’attelle à étudier comment ces comportements interagissent avec les règles édictées sur ces mêmes marchés.

Le premier chapitre examine le comportement des producteurs sur les marchés de capacité. Un marché de capacité permet aux producteurs de générer des revenus à l’avance en échange de leur engagement à être disponibles, ce qui doit les inciter à suffisamment investir. Ce chapitre propose une nouvelle approche pour modéliser les offres sur ces marchés en utilisant la théorie des options réelles. Cette méthodologie offre
un nouvel éclairage sur l’interaction entre les caractéristiques du contrat vendu sur le marché de capacité et les offres faites par les producteurs. Par exemple, je montre que les offres diffèrent considérablement de la méthode couramment employée dans ce contexte : elles sont toujours plus élevées dans le cadre des options réelles. Je constate également que la durée du contrat augmente constamment l’offre lorsque l’on utilise la théorie des options réelles, alors qu’elle a un effet ambigu avec la méthode traditionnelle.

Le second chapitre souligne l’importance de bien choisir comment la demande sur les marchés de capacité est mise en place. En effet, il démontre qu’en fonction des caractéristiques des marchés et des acteurs, certaines façons de prendre en compte la demande dans ces marchés et la manière dont les coûts sont alloués peuvent avoir des effets inattendus sur le surplus. Par exemple, dans une première partie, j’étudie une demande centralisée dans laquelle un acteur unique achète la totalité des capacités. La question se pose alors de l’allocation de ces coûts sur les consommateurs : doit-elle reposer sur une allocation forfaitaire ou unitaire qui dépendrait de la consommation ? Lorsque le besoin d’investissement est dû uniquement à un prix plafond, alors la première méthode génère plus de surplus pour la société. Cependant, lorsqu’il existe un rationnement involontaire (rolling blackout), alors une allocation unitaire qui réduit la demande peut être bénéfique.

Enfin, le dernier chapitre pose la question de savoir comment s’assurer d’avoir suffisamment d’investissements lorsque l’on ne connaît pas parfaitement la demande future individuelle des consommateurs. Dans ce contexte, les contrats ne doivent pas alors seulement être mis en place pour optimiser la consommation et assurer des revenus suffisants pour réaliser des investissements, mais aussi pour gérer des caractéristiques non observables des consommateurs. Cette approche permet de démontrer théoriquement l’existence des questions de redistribution dans ce contexte. Plus précisément, je montre que la mise en œuvre des contrats optimaux qui maximisent le surplus global des consommateurs compte tenu d’un niveau d’investissement conduit à discriminer négativement certains consommateurs, notamment les plus petits.

Laboratoire d’accueil

La thèse a été réalisée dans le laboratoire d’économie de l’université Paris Dauphine-PSL. Ce laboratoire regroupe un grand nombre de chercheurs en économie travaillant sur des problématiques très diverses. Il inclut notamment le Centre Géopolitique d’Énergie et des Matières Premières (CGEMP) qui regroupe l’ensemble des professeurs et doctorants travaillant sur les questions énergétiques et environnementales. La thèse est également liée à la Chaire European Electricity Markets (CEEM) dont les sujets d’étude sont les marchés de l’électricité.

 

Pour plus d’informations : https://leda.dauphine.fr/.

Soutenance de la thèse

La thèse intitulée « Securing Investments in Electricity Markets – Three Essays on Market Design » a été soutenue le 25 mars 2024 à l’Université Paris Dauphine-PSL devant un jury composé de : Carine Staropoli, professeur à l’Université de Rouen Normandie (rapporteure) ; Matti Liski, professeur à Aalto University (rapporteur) ; Mar Reguant, professeur à Northwestern University (examinatrice) ; Thomas Tangerås, professeur associé à Stockholm University (examinateur) ; Anna Creti, professeur à l’Université Paris Dauphine-PSL (présidente) et Fabien Roques, professeur associé à l’Université Paris Dauphine-PSL (directeur de thèse).

La thèse a notamment été financée grâce à l’entreprise RTE par l’intermédiaire d’un contrat CIFRE. L’entreprise est gestionnaire du réseau de transport d’électricité français et a la responsabilité de certaines règles des marchés d’électricité. Cette thèse CIFRE a eu pour objectif d’apporter un éclairage théorique sur la question de la mise en place de certaines règles de marché dans le cadre de l’étude des performances du marché de capacité français.

La thèse est disponible ici : https://theses.hal.science/tel-04608818.

Et après la thèse ?

Léopold Monjoie est actuellement employé en tant que post-doctorant pendant 2 ans à l’université d’Aalto en Finlande. Il continue ainsi de travailler sur les marchés de l’électricité en attendant de trouver un poste de professeur dans le monde académique.

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